Fiscalité de Sarkozy: au bonheur des riches
Paul, sa femme, Virginie, et leurs trois enfants sont une famille comblée. Revenu annuel : 500 000 euros. Un patrimoine conséquent de 40 millions d'euros. Hors la participation de monsieur dans la société high-tech qu'il dirige, hors ses Rothko, Picasso et quelques bois et forêts, tous biens exclus ou quasiment exclus de l'ISF. Sa fortune le situe en haut de la pyramide des 460 000 Français assujettis à l'ISF. Il profite déjà pour sa déclaration de revenus 2006 d'un allégement. La tranche supérieure de ses revenus est imposée à seulement 40 % (contre 48,09 % en 2005), et il profite à plein de la suppression de l'abattement de 20 % qui était plafonné pour les hauts revenus. Montant de son imposition : autour de 175 000 euros.
L'achat rentable
Paul a vendu son duplex de Neuilly l'an dernier. Il vient de
signer une promesse de vente pour un hôtel particulier sur l'île Saint-Louis :
5 millions d'euros. La déduction des intérêts d'emprunts annoncée par Nicolas
Sarkozy tombe à pic. Plutôt que de payer cash, il décide d'emprunter : un
million d'euros sur quinze ans, à 4 %. Montant des intérêts : 35 000 euros la
première année. Il va pouvoir déduire 20 % de la note. C'est toujours 7 000
euros d'économisé. Le gouvernement n'a pas annoncé pour l'instant qu'il allait
limiter le cadeau aux hauts revenus. Mais il a songé aux non-imposables. S'ils
se lancent dans une acquisition, ils recevront un petit chèque du Trésor
public.
La succession réglée
Le ménage est prévoyant. Il a organisé sa succession.
Premier outil : les donations. Chaque enfant reçoit 50 000 euros. Le geste peut
être renouvelé depuis 2005 tous les six ans, contre dix auparavant. Une somme
rallongée en 2005 de 30 000 euros par enfant, un cadeau fiscal limité à cette
année-là, et déjà signé Sarkozy. Cela fait 240 000 euros libres de droits qui
auront dégonflé d'autant le patrimoine soumis à l'ISF et limiteront la facture
lorsque viendra la succession. D'autres bonus ne sont pas à exclure. L'objectif
affiché du président Sarkozy est d'exonérer 95 % des successions. Si la réforme
passe par un allégement du barème ou un relèvement des franchises, notre ménage
richissime en profitera comme tout le monde.
L'investissement payant
Encore une occasion de réduire son impôt sur la fortune. Le
gouvernement a confirmé hier que certains «investissements» étaient
susceptibles d'un gros rabais. Le couple hésite entre «aider» sa fondation
préférée, investir dans la PME du petit cousin ou attendre que l'université de
leur benjamine ait un statut autonome. Paul et Virginie vont pouvoir soustraire
jusqu'à 50 000 euros de leur ISF pour gratifier l'oeuvre de leur choix.
Le jackpot final
Paul et Virginie font leurs comptes. Ils sont redevables
pour leur patrimoine (40 millions d'euros), de 648 000 euros d'ISF (hors le
cadeau à la fondation, qu'ils pourraient reporter). S'ajoute une dizaine de
milliers d'euros de taxes foncière et d'habitation. Déjà le bouclier fiscal en
vigueur qui plafonne les impôts à 60 % des revenus limite leur ISF à un peu
moins de 300 000 euros. Notre couple devrait bénéficier cette année d'une
ristourne de 548 000 euros. En passant le bouclier à 50 % des revenus et si
la CSG et la CRDS sont incluses dans le bouclier , Sarkozy relève encore le
rabais de 90 000 euros. Morale de l'histoire : le bouclier a presque effacé la
note de l'ISF, les 648 000 euros de départ.
Catherine MAUSSION