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28 juin 2007

Refonder la gauche : les pratiques de participation comme méthode ?

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Le raccourcissement hystérique des durées dans le débat public au détriment des continuités explicatives et des remises en perspective fait tomber régulièrement aux oubliettes de la pensée et de la réflexion ce qui nous avait été présenté comme un événement. Ainsi, qui désormais pour évoquer ce que beaucoup d’observateurs patentés annonçaient comme une méthode « neuve » de coopération avec les citoyens permettant d’améliorer l’efficacité des politiques et de l’action publiques ? Qui désormais pour évoquer, ne fût-ce que du bout des lèvres, les « pratiques de participation » dont la suggestion fut pourtant la principale originalité du projet de la candidate socialiste à l’élection présidentielle ?

J’avais tenté en avril 2006, un premier décryptage de ce que je considérais alors, dans les formes prétendues « participatives » mises en oeuvre par la candidate socialiste, comme une illustration exemplaire des « confusions de la participation médiologique ». Autrement dit comme la proposition d’une offre politique qui, sous le terme de « démocratie participative », ne faisait que construire un degré supplémentaire de sophistication dans le registre de la communication politique. J’y suggérais même que cette stratégie volontairement confusionnelle ne pourrait, tôt ou tard, que se cogner à sa propre impasse...

Quelques mois plus tard, nous voilà arrivés là où nous en sommes. C’est-à-dire à un moment où la refondation de la gauche est devenue indispensable. Indispensable, pour ceux qui ne veulent pas se résigner aux défaites répétées qui, au-delà des luttes personnelles et parfois « boutiquières », trouvent leur origine dans l’impensé d’une nécessaire redéfinition des valeurs de la gauche qui auraient à prendre en compte aussi bien les évolutions de la société que les nouveaux enjeux planétaires, ainsi que les nouvelles aspirations des individus... Mais, au-delà de l’intention et de la reconnaissance de la nécessité de ce chantier qui s’est exprimée de façon plurielle et conséquente depuis la présidentielle dans nombre de tribunes, se pose la question cruciale d’une méthode cohérente avec cette finalité, mais également avec la prise en compte des nouvelles façons de « faire société » qui caractérisent profondément les transformations des citoyens dans leur manière « d’être et d’agir ensemble ».

Et c’est là que des « pratiques de participation », imaginées avec un certain nombre de conditions et de qualités (qu’elles ne réunissent que rarement aujourd’hui, je l’admets), pourraient constituer une des formes possibles de construction de cet « être ensemble » et de cet « agir collectif » susceptibles de dépasser l’hégémonie d’un corpus d’idées qui s’est constitué comme dominant (travail, autorité, protection, etc.).

Refonder la gauche nécessite une volonté partagée si possible par une pluralité des courants historiques de la gauche (condition nécessaire mais pas suffisante), mais également l’invention et la mise en oeuvre d’une méthode qui permettent sérieusement au plus grand nombre (c’est-à-dire à ceux qui le souhaitent et qu’ils adhèrent ou non à un parti) de participer à l’élaboration de cette refondation. Si la gauche a quelque chose à dire et à proposer, c’est avant tout à la population active. Elle doit admettre que la population active se compose toujours, pour plus de la moitié, d’ouvriers et désormais d’employés depuis la tertiarisation de l’économie, mais aussi de classes moyennes dont la situation économique et sociale s’est (contrairement à ce que l’on avait pu penser dans les années soixante-dix) rapprochée de celle des ouvriers et des employés. Le changement politique attendu, et qui constitue l’épicentre de cette refondation, est de travailler non plus pour ces catégories (en traduisant leurs aspirations en programme), mais de travailler avec elles, la transformation de leurs plaintes en capacité de propositions et d’actions. Les pratiques de participation, dès lors qu’elles sont conçues et mises en oeuvre sérieusement, constituent de tels espaces, possibles lieux d’invention d’un autre modèle de liens à même de penser et de construire de nouvelles significations communes : cette nouvelle façon d’être et d’agir ensemble, susceptibles de constituer un nouvel imaginaire de communauté politique et... démocratique. Car la refondation de la gauche est aussi affaire de méthode !

Jean-Luc Charlot,sociologue

Dernier ouvrage paru :

le Pari de la participation. Approximation d’une activité politique. L’Harmattan, 2006,

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