Plus de deux millions de Français sont allés glisser leur bulletin de vote dans l'urne.
ANALYSE - Plus de deux
millions de Français sont allés glisser leur bulletin de vote dans l'urne.
Retour sur une leçon de communication...
La
mobilisation autour de la votation a étonné tout le monde,
y compris les plus engagés. Olivier Besancenot, chef de file du NPA, s'est dit
«surpris» ce lundi matin à l'annonce du nombre de votants. Même avis du côté de
Jean-Luc Mélanchon, président du parti de gauche, de Benoît Hamon, porte-parole du PS, et des organisations
syndicales ayant chapeauté le scrutin. Ces dernières parlent d'un
«rassemblement historique». Entre un réseau de communication bien ficelé et un
contexte économique difficile, tous les ingrédients étaient réunis pour
mobiliser les Français.
Un «système D» bien
ficelé
Soixante-deux organisations syndicales, associations, élus se sont mobilisés
pour amener les Français jusqu'aux urnes. Un travail de terrain pour les
différents acteurs qui ont mené campagne chacun dans leur coin. «Il n'y a pas
eu de centralisation de la communication», assurent les organisateurs. «Le
mouvement n'a pas été politique, ajoute Bernard Poisson de la CFTC Poste, ça a
été le "système D" et c'est pour cela que ça a fonctionné». Si chacun
semble avoir communiqué dans son coin, le comité national contre la
privatisation de la Poste avait tout de même mis en place de menus moyens. Notamment
un site Internet présentant l'ensemble des raisons de l'appel au vote. De
vastes campagnes d'affichages ont aussi été menées un peu partout en France.
Les mairies ont joué les relais
Les mairies ont également joué un rôle primordial dans la mobilisation autour
de la votation. Certaines ont accepté de mettre à disposition une urne devant
ou dans leurs locaux. D'autres sont même allées jusqu'à afficher la date de la
votation sur des panneaux lumineux en ville et à poster un appel sur leur site
Internet.
Dans le 2e arrondissement,
le maire (Verts) du 2e arrondissement de Paris, Jacques Boutault, a mis à
disposition des locaux pour les réunions du comité national contre la
privatisation. «Il m'a semblé tout à fait normal que les mairies relaient cette
information, mais aussi qu'elles soutiennent cette initiative qui vise à
défendre l'avenir de notre service», explique-t-il, en précisant qu'aucun moyen
financier du budget de la mairie n'a été utilisé.
La Poste, une
entreprise à part
Le succès de la votation citoyenne tient aussi à l'attachement profond des
Français pour La Poste. C'est en tout cas ce qu'expliquent les organisateurs du
vote. Pour Bernard Poisson, responsable de la CFTC Poste, «La Poste, c'est
autre chose qu'une simple entreprise. Les gens y sont attachés, même si souvent
ils ne savent pas bien pourquoi. Il y a un lien affectif», confie le
syndicaliste à 20minutes.fr. Bien souvent seule présence de l'Etat et seul
service public dans les zones rurales et périurbaines, la Poste joue un rôle de relais auxquels les Français se
sentent fortement liés. «Il s'agit bel et bien d'un vote d'attachement,
ajoute Frédéric Dabi, directeur du département opinion publique de le
l’institut de sondage IFOP, d'autant plus dans un contexte économique qui est
difficile».
Une valeur sûre dans un
contexte de crise
Les citoyens «se sont rendu compte, avec la crise que nous traversons, de la
fragilité des systèmes basés sur la rentabilité des capitaux», reprend Jacques
Boutault. «Pour eux, ce service public est une valeur sûre qu'ils ne veulent
pas voir disparaître», conclut-il. «Les ménages les plus fragiles craignent de
devoir payer et interprètent» ce projet du gouvernement comme «une attaque au
modèle social français», analyse Frédéric Dabi.
Un vote de défiance
Les Français sont donc méfiants face au projet du gouvernement. Pour Bernard
Poisson, le scrutin «a cristallisé un certain nombre de mécontentements des
citoyens» face à la politique actuelle. «Ce vote est aussi le signe que les
Français ne veulent pas d'une politique libérale.» Un point de vue que partage
le maire du 2e arrondissement de Paris: «Les Français se rappellent les
promesses faites lors de l'ouverture du capitale de France Télécom. Le
gouvernement avait promis que l'entreprise ne serait pas privatisée, c'est
pourtant ce qu'il s'est passé (...) De plus, on a beaucoup parlé de cette
entreprise (France Télécom): la vague de suicides qui la touche est le premier sujet de
conversation* des Français en ce moment», ajoute Frédéric Dabi, selon qui les Français «sont inquiets de l’effet d’une
privatisation».
>> Etes-vous
attachés au service public de la Poste? Etes-vous inquiets des effets d'une
éventuelle privatisation? Donnez-nous votre avis dans les commentaires
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*Selon le baromètre Ifop-paris match
à paraître jeudi
Maud Descamps